Le chevreuil rutilant sauta, traversa la rivière et s'arrêta. Il huma l'air, à la recherche de quelque danger. Aucun, pour l'instant. Préférant rester à l'affût, il mangea toutes oreilles dehors.
Effrayé par le bruit de sa propre mastication, il stoppa net. Échappa sa bouchée. Tendit l'oreille. Attendit, l'oreille tendue. Plus un son. Le prédateur s'était enfui.
Nouvelle bouchée, nouveau bruit. Oreille. Attente. Rien. Jamais le temps de déglutir. Pas de repos pour le chevreuil parano.
À craindre tous les sons de la nature, à guetter le moindre bruit, il a peur de son ombre. Trop à l'écoute du monde, il s'invente le danger. Chaque bouchée est un ennemi potentiel. Toujours incomplète, jamais avalée.
Le chevreuil parano est anorexique malgré lui.